La capitale de l'Iran attire autant qu'elle repousse. Ville grouillante et fatigante, son ambiance est à l'image des grandes métropoles de l'Asie Mineure. Mais elle est également parsemée de palais somptueux, d'élégantes mosquées et de quartiers à l'ambiance plus paisible. Un peu plus à l'Ouest, la ville de Qazvin, de taille plus modeste est plus agréable et mérite clairement un détour !
Après notre première étape au nord-ouest du pays nous avons pris la direction de la jolie ville de Qazvin. La route empruntée est belle, encadrée par des montagnes arides au sable oscillant entre le blanc et le rouge. Cette petite cité, ancienne capitale, située entre les métropoles de Téhéran et Tabriz était jusqu'à ces dernières années une ville très conservatrice à la mauvaise réputation. Mais la municipalité tente aujourd'hui de développer la ville dans un esprit plus moderne, en invitant de nombreux étudiants, créant des pistes cyclables - ce qui est extrêmement rare pour le pays, il y a même un "jour sans voiture" chaque semaine! -, ainsi qu'en donnant un aspect plus jeune et branché aux monuments historiques.
C'est notamment le cas de l'immense Sa'd-al Saltaneh Caravanserai, qui abrite désormais des boutiques d'artisans indépendants, ainsi que des terrasses de cafés et restaurants qui s'animent en soirée. Les jeunes viennent se regrouper dans les courtines de ce superbe bâtiment multicentenaire, particulièrement bien mis en valeur par un éclairage très doux.
En journée le cadre est également très charmant, le Caravanserail est particulièrement bien restauré et ses allées couvertes conservent une fraîcheur bienvenue aux heures les plus chaudes.
En lisière de ce dernier se trouve l'immense complexe des mosquées du Vendredi et Masjed-e Jameh, sublime!
Le centre ancien est parsemé de nombreux bâtiments préservés et particulièrement bien mis en valeur comme les anciennes portes de la ville, quelques belles villas traditionnelles, et le sublime mausolée Imamzadeh-ye Hossein. Pour la première fois nous visitons ce genre de temple, très fréquent en Iran, entièrement recouvert de miroirs en son intérieur. L'effet est saisissant!
Comme dans la plupart de ces lieux, considérés comme les plus saints qui soient, les femmes doivent être entièrement couvertes et revêtir le Tchador, un épais voile, souvent noir et très solennel. Pour les hommes on demande parfois de couvrir les bras mais cela reste rare.
Nous avons également été surpris de constater que les femmes sont davantage fidèles que les hommes en général -prière, fréquentation des mosquées, argent donné en offrande-.
Nous repartons le lendemain en direction de la capitale Téhéran, que tout le monde ici nous a décrite comme une ville désagréable, polluée et bruyante. Nos premières impressions ne vont malheureusement pas tordre le cou à ces rumeurs...
La ville grouille dans tous les sens, les rues pullulent de voitures et piétons. Et encore, on y était pendant les vacances scolaires et la circulation y est divisée par trois. D'ailleurs les voitures ne prennent pas garde aux piétons et foncent en vous effleurant. Adrénaline garantie à chaque passage piéton! La pollution aussi bien atmosphérique que sonore ajoutée à la chaleur sont épuisantes.
Après un pique-nique sur un rond-point du centre ville (cf. Bon à savoir), nous partons en visite dans le quartier des musées qui regroupent de nombreux bâtiments culturels dédiés à l'art-contemporain, les sciences, ou les arts traditionnels. Parmi ces bâtiments, l'ancienne ambassade américaine possède une histoire intéressante. Autrefois très prospère et vivante pendant le règne du Shah, elle est aujourd'hui transformée en musée... de l'espionnage et de la propagande américain! De nombreuses peintures murales présentes en ville témoignent d'ailleurs de la peur des Etats-Unis que le gouvernement actuel tente d'imposer aux iraniens.
Malheureusement pour nous, les horaires de ces établissements semblent parfois aléatoires, ou les prix ont explosé avec l'embargo... Nous rentrons donc bredouilles et usés par une après-midi de marche avec nos sacs-à-dos sous une chaleur écrasante pour retrouver notre hôte.
Nous consacrons notre seconde journée en ville à l'exploration des quartiers moins touristiques de la capitale, notamment celui du parlement, ultra-protégé et invisible derrière son haut réseau de murs. Un peu plus loin se trouve le Madraseh va Masjed-e Sepahsalar, une université coranique, nichée dans l'un des plus somptueux et anciens bâtiments de la capitale. Mais les gardiens ne nous laisseront pas pénétrer dans l'édifice...
Nous nous consolerons donc avec l'élégante façade du Palais Masoudieh avant de nous réfugier au frais pour l'après-midi dans les allées du Grand Bazar.
Nous entrons alors dans LE quartier le plus touristique de Téhéran et on le ressent immédiatement. Les commerçants racolent chaque passant, les prix des snacks explosent à mesure que leur qualité diminue... Comme tous les bons touristes nous nous faisons avoir par un burger qui, une fois servi ne ressemblera en rien à celui qu'on nous a présenté, et dont le prix aura inexplicablement augmenté... il devait y avoir une malencontreuse erreur.
Mais il faut reconnaître que le palais du Golestan, -le monument qui attire le plus de visiteurs- mérite à coup sûr une visite. Le faste de chacune de ses pièces semble rivaliser avec la suivante, témoignant de l'extraordinaire et excessive richesse des hommes et femmes qui ont dirigé le pays pendant des générations.
L'extérieur est particulièrement élégant avec ses bassins et ses murs couverts de belles mosaïques. Des terrasses surélevées et couvertes accueillant autrefois les souverains qui pouvaient profiter d'un peu de fraîcheur en évitant les insectes qui parcouraient le sol. Les décors y sont somptueux.
Une fois à l'intérieur, on évolue tantôt dans des salles destinées à présenter les exceptionnelles pièces de collection des anciennes familles souveraines à la façon de mini-musées, tantôt dans des pièces luxueuses recouvertes de miroirs ou de stucs très travaillés.
La mise en valeur de ces lieux extraordinaires a aujourd'hui deux intérêts majeurs pour le gouvernement qui affirme ainsi la grandeur du peuple Perse qui a su créer des chefs d'oeuvre depuis des siècles, mais rappelle également au peuple les incroyables richesses que les puissants d'autrefois accumulaient au détriment du peuple pour leur usage privilégié. Aujourd'hui l'argent est entièrement dédié à l'édification de monuments religieux -toujours plus grands...- à la gloire des imams. Des œuvres bien plus pieuses en soi!
Le Grand Bazaar de Téhéran est comme son nom l'indique : Grand! Très Grand! Presque trop, et fourmille de milliers de passants, déambulant tranquillement sous ses arcades ou marchandant frénétiquement tous types de produits -de la breloque au produit luxueux-, un véritable temple de la consommation à outrance! Contrairement à celui de Tabriz, ici l'ambiance et la taille impressionnent plus que le bâtiment en lui-même qui présente des sections nettement moins entretenues que d'autres. De nombreuses salles restent cependant remarquables et quelques mosquées sont disséminées de part et d'autre de l’impressionnant réseau d'édifices.
Nous terminons notre journée par une visite du colossal mausolée de l'Imam Khomeini. Sa taille démesurée, son service de sécurité interdisant tout contact entre hommes et femmes -ainsi que l'utilisation d'appareils photo à l'intérieur de l'édifice-, mais également ses élégants dômes dorés et son intérieur mêlant plafond et parois de miroirs et styles plus modernes en font un lieu exceptionnel et à l'image de la ville : à la fois exaspérant et fascinant !
Nous avons consacré notre troisième et dernière journée à Téhéran à la visite des quartiers périphériques de Téhéran. D'abord au centre de la ville, constitué de deux immenses parcs verts, Park-e Abo-Atash et Park-e Taleghani, reliés entre eux par l'élégant pont Tabiat, symbole du modernisme de la capitale iranienne. Comme décidément rien ne se passe comme prévu pour nous dans cette ville, l'accès au niveau supérieur nous sera interdit -tournage TV? passage d'une célébrité ou homme politique? ...-, et la plupart des restaurants ou snacks sur place sont fermés pour une raison inexplicable.
C'est depuis ce belvédère que l'on observe le mieux le contraste entre les quartiers sud de la ville , bas, grouillants et condensant la majorité des palais et bâtiments anciens de la ville, et les quartiers nord, plus modernes, hérissés de tours vitrées et de quartiers résidentiels blottis aux pieds des montagnes de Darband, regorgeant de restaurants et maisons de thé de luxe, et les stations de ski d'Arboz.
A deux pas du pont se trouve l’impressionnant musée de la Sainte Défense de l'Iran, véritable outil de propagande militaire qui rappelle à tous l'importance du conflit qui a opposé l'Iran à son voisin irakien pendant des décennies meurtrières.
Le musée est entouré d'allées bordées de chars, armes de siège, missiles dans une surenchère de démonstration de puissance.
Au nord, on trouve un autre bazar, abritant en son sein le très beau mausolée Imamzadeh Saleh, surmonté d'un superbe dôme de mosaïque turquoise.
Avant de quitter la ville nous faisons un dernier détour à l'ouest de la ville pour admirer la célèbre Tour Azadi, symbole récent de l'Iran et prouesse architecturale.
Le lendemain, nous embarquerons à bord d’un train pour un voyage d’une journée afin d’arpenter les routes du sud du pays vers Shiraz avant que les températures ne deviennent vraiment invivables dans ces régions.
Sur la route nous constatons une nouvelle fois l'extrême sécheresse qui sévit dans le pays, faisant disparaître toutes les anciennes mers intérieures, souvenirs d'un temps que les iraniens ne reverront malheureusement jamais.
On a aimé :
Qazvin, sûrement l'ambiance que nous avons le plus apprécié en un mois en Iran! Loin du cliché de l'ancienne ville traditionnelle et conservatrice.
L'exquise richesse et le raffinement du Palais du Golestan.
Les superbes façades et les élégantes mosaïques des anciens palais du centre ancien.
Les courbes de la Tour Azadi et du Pont Tabiat.
Bon à savoir :
Si le grand Caravanserail de Qazvin est LE lieu immanquable pour prendre du bon temps en soirée il est possible de trouver encore plus bobo.
Pour vivre l'expérience d'une soirée branchée il faut se rendre sur les hauteurs de la ville à la tombée de la nuit pour déguster une chicha entre amis, accompagnée de cocktails très travaillés. Oubliez la Vodka ou le Gin, prohibés, ici cela se joue à l'eau de rose, au safran, et aux graines de chia mais le résultat est souvent très sympa -et sucré-!
Rejoindre Qazvin depuis Tabriz n'a pas été de tout repos, la chaleur torride ne nous a pas encouragés à tenter le stop et nous nous sommes donc rabattus sur le bus. Mieux vaut être préparés à la cohue et au chaos qui règnent dans la grande station de Tabriz. Les différentes compagnies se ruent sur le moindre touriste, proposant chacune "son" meilleur prix, les agents crient dans tous les sens et les rabatteurs tentent tous de vous conduire à leur bureau, qui, bien sûr, est le seul a proposer un bus desservant Qazvin. Après avoir déniché et comparé plusieurs compagnies nous étions toujours loin des prix glanés sur internet... mais désemparés nous prenons le premier qui part. Il nous déposera... sur l'autoroute à plusieurs kilomètres du centre ville, en proie à une horde de taxis qui n'attendent que ça... nous finirons donc en stop pour rejoindre le centre ville!
Mais la route est superbe et laisse apparaître une nouvelle série de montagnes arc-en-ciel!
Les iraniens, comme leurs voisins turcs, raffolent des pique-niques en pleine nature. Ils y consacrent la plupart de leur temps libre et de leurs journées de vacances. Dès que l'occasion se présente ils se ruent vers les espaces verts, mais pour les citadins qui n'ont pas la chance de posséder une voiture, ou ne veulent pas braver les embouteillages, un rond-point herbeux en plein centre pourra tout-à-fait faire l'affaire! Il n'est donc pas rare de croiser plusieurs familles squattant ces petits coins de verdure au beau milieu des pots d'échappement et du bruit assourdissant de la circulation de Téhéran.
La visite du palais du Golestan se fait "à la carte". Chaque section du palais est accessible avec un billet dédié, le tarif de la visite peut donc fortement varier en fonction des options choisies.
On dit que le taux de pollution est de 80% pendant 200 jours de l'année à Téhéran, mythe ou réalité on ne saurait dire mais il est indéniable qu'on ressent cette oppression au quotidien!
Les femmes sont davantage maquillées dans la capitale, et beaucoup ont eu recours à la rhinoplastie -c’est presque un accessoire de mode d’avoir son strip sur le nez!- -et les hommes ne sont pas épargnés-
Notre budget pour 4 jours dans la capitale : 56 € pour deux
34€ de transport : 8 € de bus entre Tabriz et Qazvin, 24 € pour deux tickets de train vers Shiraz à l'extrême sud du pays (près d'un jour dans le train!) et des tickets de métro à gogo pour sillonner la capitale pendant 3 jours
6 € de visites : pour un parc et quelques musées (essentiellement le palais du Golestan)
16 € de nourriture : incluant des repas ou cadeaux pour notre hôte et ses amies. Un très bon restaurant pour 2 coûte environ 5 €, l'occasion idéale de déguster un plat traditionnel comme le Dizi (une sorte de soupe de mouton et de légumes servie dans un pot en terre cuite) agrémenté de purée d'aubergine et de pain traditionnel.
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